« Pionniers », c’est comme ça qu’on appelait les déjà vieux rockers des fifties au début des années 70. On aura compris l’idée. Ne pas attendre les mauvaises nouvelles pour parler de ceux qui nous beaucoup donné à travers leur musique. Et Jerry Lee est en tête sur cette liste de plus en plus clairsemée. Observez le jeu de la main droite (celle avec les bagouses), sa manière de tourner autour du pied de micro et aussi la manière dont l’autre suit son chemin imperturbablement sans qu’à aucun moment le chanteur ne lui accorde un regard. Nous avons affaire à un virtuose de haute volée. Qui rendra hommage à la classe avec laquelle Jerry Lee reprenait les titres du répertoire Country en remplaçant la guitare des cow-boys par son jeu de piano inimitable et en glissant parfois son nom dans les paroles. Cela a été fait ? Ah oui, j’oubliais le livre de Nick Tosches. Il faudrait que j’aille le chercher dans la bibliothèque pour voir ce qu’il écrivait à ce propos.
C’est fait ! J’ai ouvert Hellfire et j’ai trouvé presque immédiatement le passage où Tosches parle du retour du chanteur à la fin des années 60, après une longue traversée du désert. L’écrivain parle de la session d’enregistrement de Another Time, Another Place « une belle chanson de désespoir et de solitude » que Jerry Lee « chanta en studio dans le froid et la grisaille de cet après-midi du 9 janvier 1968, avec la voix de quelqu’un qui essaie de dissimuler plutôt que de révéler ce désespoir et cette solitude. » Succès. Le disque entra dans la classement country et y resta « pendant plus de quatre mois ». Dans la foulée, le chanteur enregistra plusieurs albums et parvint à hisser deux tubes country dans les dix premières places.