
Plus que toutes les autres saisons – et malgré la mélancolie de l’automne et la tristesse de l’hiver qui peuvent en faire des thèmes romantiques, comme du reste toute chose au monde, puisque la rêverie est avant tout manière de contempler – c’est donc l’été qui, par son immobilité, son statisme, son apparente « éternité », prête le mieux au rêve. Il semble qu’au beau milieu de son cours, parvenue à l’apogée de son périple, l’année hésite un instant, s’interroge pendant quelques moments « intemporels » avant de reprendre sa marche. Rien ne bouge – tout peut se laisser comprendre et saisir. C’est alors qu’il fait bon « songer ». Cet immobilisme de l’été est le meilleur aliment du rêve, qui peut s’y arrêter à loisir.
Clément Rosset, Note sur le romantisme
Le philosophe évoquait le monde d’avant en basant sa réflexion sur la littérature du XIX e siècle siècle. Dérèglement climatique oblige, il semble désormais que nous ayons le choix entre l’éternel automne au nord et la fournaise au sud. Cela n’empêche pas de se souhaiter un « bel été ». La capacité d’aveuglement volontaire est en effet une des grandes victoires de l’humanité. Je repense à cette famille qui se prenait en photo en prenant la pose, tout sourire au milieu des algues vertes. Pendant la fin du monde, il importe que le spectacle continue.