Absence, c’est le titre du très beau texte que Schuhl a consacré à la mémoire de son ami et qu’on peut lire dans Obsessions. Le mystère Eustache (je n’ai jamais été capable de dire précisément pourquoi certains de ses films m’ont fait un tel effet) est ici capté avec une justesse et une retenue qui forcent le respect. Le cinéaste : « Je le revois, c’est comme si c’était hier, c’est rue Clément-Margot, il arrive, son pas chaloupé, la gauloise bleue au coin des lèvres mains dans les poches, il aimait bien Gabin, Jean, Gueule d’amour. Son Burberry… il aimait bien Bogey aussi… et sa gauloise bleue qu’il allume en plissant les yeux, bleus. » Et aussi son cinéma, ce qui me touche précisément dans ses films et que je n’ai jamais trouvé formulé aussi bien ailleurs, « ses figures de garçons, de jeunes hommes enfantins sans aucune importance sociale, à peine des individus, totalement dépourvus de valeurs, esthétiques ou morales, sans goûts, sans adhésions, sans illusions mais sans dédain, seulement là, juste là, même pas asociaux, même pas nihilistes, encore moins révoltés, sans étiquettes, sans qualités. » Le cinéaste et les films, tous les deux réunis, inséparables, à une époque où le cinéma était plus qu’un art : « un style de vie ». Si vous ne pouvez pas acheter le livre, alors lisez ce texte sur place en vous planquant dans un coin de rayon. A un moment, Schuhl y a inséré une lettre que lui avait envoyé Jarmusch et où il explique pourquoi il a dédié son film Broken Flowers à Jean Eustache, « pur poète de la forme filmique ». Il dit, dans cette lettre, qu’au dessus de la table de travail où il écrit ses scripts, il y a une photo prise sur le tournage de La maman et la Putain découpée dans l’article nécrologique du New York Times. D’après la description qu’il en fait, il s’agit de la photo ci-dessus que j’ai trouvée par le plus grand des hasards sur le blog Les éditions derrière la salle de bain peu de temps après avoir fini le livre.
Jean-Jacques Schuh, Obsessions, Collection L’Infini, Gallimard
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Sur le mystère Eustache, je suis d’accord: mystère, mystère… mais je ne cherche plus à comprendre comme avec les films de Rohmer et un ou deux Rivette. J’ai mis le nez dans « Obsessions ». Schuhl est un écrivain rare. Ils ne sont pas légion* en France ces temps. Bon, c’est pas tout. Je vais prendre une douche de soul. Belle soirée.
* Doit-on mettre un « s » ?
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Pas de « s » 😉 Je cite : « Dans cette locution, « légion » signifie « nombreux » et ne s’accorde jamais. »
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Et moi, j’avais une faute d’accord avec la place prisE par les pills de Cash…
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« La vie est courte, l’art long, l’occasion fugitive, l’expérience trompeuse, le jugement difficile … » Aphorisme attribué à Hippocrate ; on se demande bien pourquoi
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J’ai apprécié les fausses-vraies nouvelles de Schuhl même si je reste sur ma faim. Parviendra-t-il à écrire un roman aussi brillant et virtuose que « Ingrid Caven », ce superbe Goncourt ?
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Il vaut mieux modérer nos attentes et se réjouir de ce qu’on a 😉
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Voui, mais c’est tout de même un peu paresseux.
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